5 ans à Berlin – le bilan


Berlin, Humeurs / mercredi, mars 30th, 2016

C’est l’histoire d’une jeune étudiante alsacienne qui débarquait, un certain 31 mars 2011, à Berlin. Ce jour-là, elle sentait que sa vie est sur le point de basculer, aussi bien positivement que négativement.

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5 mois à passer, c’était la période initialement prévue pour séjourner dans la capitale, correspondant à la période d’un petit stage dans l’e-commerce. Elle arrivait par la Hauptbahnhof, cette gare l’impressionnait déjà par sa grandeur et son design en verrine, des caractéristiques qu’elle ne voyait que dans les grandes villes occasionnellement visitées. Il restait encore une heure avant de se diriger au quartier Ouest-Berlin, Tiergarten, pour s’installer dans son tout premier appart berlinois. Elle décida en attendant, de s’asseoir sur un banc, seule face à ses pensées fourmillant mille questions. Elle ne connaissait personne dans la ville, tous ses proches lui manquaient, mais bizarrement, la tristesse restait latente. Ce sentiment envahissant était plutôt mitigé: de l’excitation par toutes les évidentes futures opportunités et les appréhensions, probablement reliées aux futurs défis amenant certaines décisions cruciales à prendre. Elle entrait à ce moment-là dans le monde des adultes. Tête baissée, cachant malgré tout, une forte volonté de tout contrôler. Berlin Wall Teaso

L’insouciance dominait la jeune Alsacienne, bercée par le doute, sentimentalement posée (peut-être un peu trop posée), semblait attendre un petit déclic tout au fond caché dans un coin de son cœur, mais était trop trouillarde des changements. Un jour, sans s’en rendre compte, elle vécut ces changements avant que le futur ne devienne du passé. Cette histoire est la mienne et j’ai l’impression de la raconter comme si c’était une autre vie.

À côté de ce stage à la station Klosterstraße, mon premier vrai tremplin professionnel, il y eut des rencontres et ce fut de cette façon que je bâtissais un nouveau nid social. Ce nid social n’a jamais cessé de se renouveler de mois en mois. On passait 6 mois avec des personnes dans notre quotidien, résidant temporairement dans la capitale et un jour, on ne les revoyait plus. En se rapprochant mutuellement, on s’attachait et on côtoyait leurs connaissances qui s’incorporèrent au fur et à mesure dans notre panier social. Ce fut le cas avec un nouvel ami, devenu plus tard mon actuel boyfriend, à force de faire les 400 coups avec notre bande, quand on avait encore l’âge d’enchaîner les soirées et les week-ends dans un cadre… éthylique.

Durant ces 5 ans, certaines jolies masques sont tombées, m’obligeant parfois à prendre des distances et du recul pour exterminer oculairement, les fruits pourris de mon panier social. Des tromperies, des manipulations, des abandons, de la culpabilité, des disputes et quelques larmes, finalement, notre vie est une véritable série TV. J’ai aussi dû me comporter comme une vraie garce envers certains, mais seulement parce que c’était amplement mérité. On finit par tout relativiser parce qu’on vit tous pour soi et c’est cela qui nous rend plus forts et solides pour remonter la pente, jusqu’à prendre de nouvelles décisions, sans la moindre hésitation.

Berlin, c’est aussi une grosse découverte culturelle. La preuve, 5 ans après, on n’a toujours pas fini de la découvrir, j’ai encore les étoiles pleins dans les yeux. Elle continue à me faire vibrer à chaque fois que je vois le soleil se coucher depuis le Spree ou que j’entends des sons indie venant des bars de Friedrichshain.

Les ouvertures de nouveaux restos provoquaient un changement dans mes habitudes alimentaires. Il y a cinq ans, mes petit-déj’ se résumaient à des bols de céréales et petits pains au chocolat. Cela ne me dérange plus de prendre des longs brunchs salés.

J’ai frôlé le chômage avant de retrouver un nouveau job. C’est pas élogieux de dire, mais mes contacts professionnels au sein de Berlin se sont révélés efficaces. Mon job pour un site de mode en ligne, me rendait plus, (à mon plus grand malheur!) attentive à mon style vestimentaire. Je suis trop fan des marinières et des motifs à rayures… Mais le plus important reste ma passion pour mon job, qui n’arrête pas de m’apprendre de nouvelles choses dans ce domaine.

La fermeture du Magnet Club, ma boîte préférée, a presque signé l’arrêt de mes périodes fêtardes. Adieu les soirées rockbar, indie et rétro-punk…

Pourtant à mes yeux, Berlin représentait toutes les attitudes décalées, c’est punk, c’est cheap, c’est underground, c’est rock’n’roll, c’est sale, ça parle allemand, j’eus même l’impression de retourner dans les années 90: Ce n’est pas aussi fancy que Londres, Paris ou New-York, personne n’était sincèrement partant de vivre à Berlin. Et j’adorais cela, car on se sentait tranquille et personne ne nous jugeait. Chaque quartier de la ville avait toutefois sa propre atmosphère, qui n’arrête pas de changer d’année en année et ce n’est pas forcément facile de la cerner, tant mieux pour moi! La gentrification a malheureusement eu raison de Berlin, mais d’un autre côté, que dire, à part se plaindre, quand on croise des sans-abris ou quand on lit des histoires sordides? La planète est destinée à partir en vrille de toute façon.

street art berlin

Vous me demanderez si je me sens enfin Berlinoise? Ma réponse, est oui, malgré les commentaires qui peuvent automatiquement surgir sur mon profil et mes nombreux voyages. Oui, je me sens Berlinoise, même si je n’ai jamais pu mettre les pieds au Berghain, même si je ne mange pas bio (mais je mange sainement!), même si je n’aime pas le Club Mate, même si je ne mange pas souvent du Currywurst, même si je ne sirote pas tous les jours du Sojamilchkaffee dans les terrasses de Prenzlauer Berg, même si je ne vais pas au Mauerpark tous les week-ends, même si je ne prends pas le vélo pour aller au boulot, parce que je préfère prendre le S-Bahn, alors que c’est à deux stations de chez moi; je m’en fous complètement, je rentre chez moi, j’allume la radio sur FluxFm, ou je regarde les rediff des Anges de la Télé Réalité ou les Marseillais en Afrique du Sud et je me sens très bien comme ça. Parfois, il suffit même que de m’arrêter sur le pont du Treptower Park pour me rappeler de cette jeune Alsacienne, 5 ans auparavant et relire les chapitres berlinois vécus. C’est ce sentiment de confort qui me permet de me sentir chez moi, dans cette ville qui ne dort jamais. On vit une vie à la fois normale et exceptionnelle, car Berlin change et nous aussi, envers et contre tout.

moleculeman

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