Une année en plus pour les bouddhistes! C’est le Nouvel An Khmer ou le Chaul Chhnam Thmey. J’en avais déjà parlé l’année dernière du Nouvel An Khmer en 2012. C’était l’occasion d’écouter quelques morceaux de chansons via des vidéos de karaokés Raksmey Reymeas sur Youtube. Des karaokés que mes parents me forçaient à en regarder lorsque j’étais petite. Je trouvais ça, à l’époque tellement… ridicule, old school, pas très évoluée, ce n’était pas à mon goût. Bon oui, je vais être franche, je trouvais ça trop nulle!
Au fil des années, je pris conscience de tout ce que mes parents me disaient, m’enseignaient ou me faisaient écouter. Je sais que ce sont ces choses-là qui rappellent leur enfance, leur adolescence, leur mode de vie avant qu’ils arrivent en France. J’ai compris qu’il était bien plus qu’essentiel de nous transmettre leur culture. A l’époque, je n’étais qu’une pauvre ado qui écoutait non-stop du rock sur Europe 2. Je ne comprenais rien à ce que mes parents me racontaient, je ne les prenais pas au sérieux. Mais petit à petit, je me montrai intéressée; ma mère ayant la santé fragile, c’était un moyen pour moi de passer énormément de temps avec elle. Elle a toujours été intarissable sur nos origines, les endroits où elle, mon père et leurs amis ont grandi, l’itinéraire qu’elle avait empruntée pour fuir la guerre du Vietnam. On passait des heures à regarder notre vieil ordinateur de famille des planisphères en zoomant le Sud du Vietnam et lire les noms de villes. Trois ans après son triste décès, nous avons enfin eu l’opportunité de partir en famille au Vietnam, l’été 2008, grâce aux économies de mon père depuis des années de travail. On a passé trois mois là-bas.
Beaucoup d’imprévus également, comme nous n’étions pas très bien organisés. Surtout que c’était pour visiter le reste de notre famille. La seule famille qui nous reste au monde dans différents petits villages de Khmer Krom au delta du Mékong, à des centaines de kilomètres de Saigon. D’ailleurs, on avait largement le temps, 3 mois en Asie, c’est assez long. On n’était pas des backpackers, mais , je voulais malgré tout, tellement voir du pays. Mon père qui semblait tellement inflexible à tout déplacement, se montrait largement hésitant quant à nous emmener au Cambodge.
Il écoutait régulièrement la radio khmère pour se tenir à jour des actualités, notamment en ce qui concerne les conflits khmers-thaïs. Je sais qu’Angkor Wat n’y est qu’à quelques kilomètres de la frontière thaï, je redoutais aussi d’y aller, mais j’ai fait comprendre à mon père que j’avais trop envie d’aller là-bas. Finalement il a craqué et on s’était mis 1 semaine et demi pour visiter le Cambodge! Départ à Hô Chi Minh Ville à l’aube des 5 heures du matin pour une durée d’environ 12 heures de bus, jusqu’à Siem Reap. Je ne savais pas vraiment dans quoi nous allions nous embarquer, mais avec ma petite sœur et mon petit frère, on suivait notre père et on avait envie de voir à quoi ressemblait le Cambodge! On voulait voir en vrai et arrêter de nous baser sur les vidéos karaokés et documentaires.
Ces 3 jours à Siem Reap ont été sûrement les plus beaux moments de mon voyage. J’ai aimé l’atmosphère quasiment familière dans cette ville, sans trop comprendre pourquoi, sûrement parce que j’ai l’habitude de côtoyer des personnes khmères et je pouvais déjà imaginer à quoi ressemblait leur mode de vie. On avait rencontré pas mal d’expatriés Français, qui nous impressionnaient par leur détermination, ainsi que leur satisfaction personnelle et professionnelle au Cambodge.
J’envie ces personnes, qui ont la spontanéité de vivre ailleurs et réussir leurs vies. Ça me réchauffait le coeur qu’ils soient tombés amoureux du Cambodge.
Après Siem Reap, nous avons poursuivi notre excursion à Battambang où résidait un cousin de mon père. C’était une ville où j’avais eu l’impression de vivre au Moyen-Âge, tellement c’était pauvre. Je regrette qu’on y ait passé que 2 jours, parce que ça m’aurait intéressé d’en savoir un peu plus.
Et pour le reste de notre semaine khmère, on a pris une voiture pour aller jusqu’à Phnom Penh. Les bâtiments officiels, les hôtels, etc ont une architecture vraiment bien fidèles à la culture khmère et ça me plaisait beaucoup. Notre hôtel était à proximité du boulevard Sisowath au bord du Tonlé Sap.
Les moto tuk-tuks flanaîent en masse dans les rues de Phnom Penh. Impossible de ne pas s’approcher du Palais Royal de la famille Sihanouk. On a eu l’occasion d’en savoir un peu plus sur son domicile, visiter le jardin et les petits temples annexes.
Pour dîner, nous avions envie de manger comme si on était à la maison. On se baladait les après-midi au Psar o Russei, le marché russe de Phnom Penh, qui foisonnait de couleurs, de bruits, d’odeurs.
On se bousculait tous, on négociait le prix d’or en dollars, on bavait devant les insectes grillées (eh oui, j’adore ça ^_^). Et enfin un autre, qui me semblait absolument important à visiter, même si c’était horrible, c’était le musée Tuol Sleng. J’avais regardé plein de documentaires et lu des bouquins à propos des Khmers Rouges et ce génocide qu’ils ont commis, qui m’ont donné la chair de poule. Mon père, ravi que je m’y intéresse, était totalement partant à y faire un tour avec ma petite sœur et mon petit frère, pour qu’ils puissent comprendre ce qu’il s’est passé dans cet endroit. Beaucoup d’horreur et de révolte.
Ce court mais fascinant séjour au Cambodge m’a permis de vraiment me rapprocher de mes origines et l’histoire de notre culture. Désormais, je ressens un réel attachement avec ce pays. Je suis fière de voir à quel point ce pays est magnifique et riche en couleurs et traditions et à la fois déchirée par son passé dramatique et la pauvreté des habitants. Cela m’a tellement marqué et attristé que j’ai fini par me détester et m’en vouloir de ne pas avoir été aussi attentive, plus jeune, aux pays d’origine de mes parents et ascendants. Maintenant que j’ai visité le Cambodge, je n’arrête de lire des blogs de voyage et d’expatriés partis en Asie. Je regarde des reportages sur la vie à la campagne, des villageois khmers, l’évolution économique et politique du pays. Je lis des articles et me tiens informée des actualités. Je vais peut-être commencer doucement à économiser pour repartir là-bas.
En attendant, je vais manger un gâteau khmer, le nom kôm, histoire de profiter de ce nouvel an khmer. Je replonge dans mes souvenirs d’adolescence, des discussions avec ma mère avec en fond sonore, de la musique traditionnelle, sur laquelle les danseuses Apsara y dansent. Dès mon retour en Alsace, j’irai voir ma mère déposer des fleurs et mes offrandes et prier à la pagode bouddhiste pour elle.
Oh que ton histoire est belle!
Il t’a fallu du temps pour apprécier et ça me parait normal. N’oublie pas que pour grandir il faut passer par cette phase de rejet de tout à l’adolescence, la construction n’en est que plus harmonieuse par la suite.
Tu as tellement de chance d’avoir une double culture, profite en à fond. C’est là que réside ta différence, mais aussi et surtout ta richesse.
Ton papa doit être fier que ce merveilleux pays puisse enfin te fasciner et t’attirer.
De tout cœur je te souhaite de pouvoir y retourner encore et “Angkor”…..
Moi j’y étais 2 fois et j’y retournerai, c’est sûr!
A bientôt pour un nouvel article, j’espère.
Je valide totalement ton commentaire! C’est avec l’âge qu’on change et qu’on voie les choses d’une manière différente. En tout cas, aujourd’hui, je suis vraiment fière d’avoir grandi de deux, non trois cultures différentes! (mes parents ont grandi à la fois dans les cultures khmère et vietnamienne) – Maintenant j’ai compris leur message, il est hors de question que je laisse tout tomber, c’est effectivement une vraie richesse. Lorsque j’aurai des enfants, je leur ferai bien sûr passer le message et leur faire comprendre d’où notre famille venait.
J’ai trop envie de repartir en Asie! Bises de Berlin 🙂