Durant notre séjour à Seoul, nous avons profité d’une demi-journée pour effectuer une excursion moins… funky : le DMZ (= Korean Demilitarized Zone). Une expérience que nous n’avons finalement pas regretté.
Avec nos belles découvertes séoulites où résonne à fond la K-Pop, jusque dans les petites ruelles éloignées, ces restaurants de barbecue où des groupes d’amis célèbrent leur fin de journée en sirotant leurs bols de makgeollis face à la douceur des monuments historiques, on oublie même qu’à 1h de Seoul en voiture, se trouve la zone la plus délicate du monde : la zone la plus militarisée du monde, composant la frontière avec la Corée du Nord.
Voilà déjà plus de 7 décennies que les deux Corées sont en froid (on pourrait même dire de guerre, vu qu’aucun traité de paix n’a été signé depuis la fin de la fameuse Guerre de Corée en 1953). Pour effectuer une telle excursion, il faudra passer par une agence proposant cela. Libre à vous de décider quoi visiter et à quel prix payer. En ce qui nous concerne, nous nous sommes adressés à l’agence Koridoor Tour et avons opté pour cette offre.
Je ne vous cache pas ma nervosité avant d’aller au DMZ, mais comme mon copain est Berlinois et né avant la chute du Mur, c’est un sujet qui ne nous laissait pas indifférent.
Pour commencer, nous sommes allés rejoindre le bureau de l’agence Koridoor (située à côté d’un camp USO – un organisme pour divertir les membres de l’armée américaine à l’étranger) pour notifier notre présence auprès de la guide et faisons connaissance avec notre groupe de visite. On était une dizaine en tout, ce qui donnait une ambiance très sympathique. Un peu avant 8h, nous montons dans le mini-van. Pendant le chemin, notre guide se présentait et nous donnait des petites infos intéressantes comme le tout premier gratte-ciel de Seoul, annonçant le boom économique aux Sud-Coréens. Notre guide était une jeune Sud-coréenne, dynamique et plutôt drôle, ce qui m’a quelque peu interloquée, après avoir lu des articles sur DMZ où les touristes parlaient d’ambiance morose. Bon, ça détend encore plus l’ambiance dans la voiture, ce qui n’est pas plus mal.
Avant même d’arriver au DMZ, on voyait déjà des fils barbelés au bord de l’autoroute, ainsi que des postes de gardes militaires à toutes les kilomètres. Au loin, un grand lac séparait une espèce de forêt, on comprit vite qu’il s’agissait de la Corée du Nord.
On commence notre visite à Imjingak, un parc de recueillement. On y découvre un autel où les Sud-coréens ont l’habitude de prier pour leurs membres de famille encore restés en Corée du Nord. Les contacts entre les familles ne sont pas les plus simples, les lettres envoyées peuvent prendre jusqu’à un an avant que la famille nord-coréenne ne les reçoit. À côté de cet autel, se trouve un deuxième, destiné aux émissions de TV, une autre méthode pour les Sud-coréens de donner des nouvelles à leurs proches restés en Corée du Nord, si par chance, l’émission est captée par la télé nord-coréenne.
L’ambiance n’est pas si déprimante qu’on pourrait le croire (tout cela à cause du succès touristique ? ou serait-ce juste culturel où les Coréens n’aiment pas montrer leurs émotions), mais on ne peut s’empêcher de se sentir touché, mélancolique. On voit beaucoup de couleurs et de rubans de messages accrochés au mur et au pont de la Liberté. Face au mur, se trouve un train qui circulait dans le passé entre les deux Corées, lourdement endommagé depuis la guerre, définitivement inapte à traverser du Sud au Nord.
À une dizaine de minutes de là, nous traversons le pont de l’« Unification » pour rejoindre le Troisième Tunnel (sur les quatre tunnels souterrains connus et ouverts aux visites touristiques), chose que j’ignorais. Quatre tunnels d’agression ont été découverts en 1974, 1975, 1978 et 1990 par les forces armées sud-coréennes entre les deux pays antagonistes et il ne leur en fallait pas plus longtemps pour accuser l’armée nord-coréenne de vouloir infiltrer la Corée du Sud par la voie souterraine et en conséquent, de recommencer les attaques… Cette accusation fut rejetée par le gouvernement nord-coréen, qui retourne également cette accusation envers son voisin. On a eu droit un petit film de 8 minutes (ou plutôt un film propagandiste à l’américaine) narrant l’histoire de ces quatre tunnels.
Après cela, nous prenons notre courage à deux mains (ou plutôt notre motivation à s’exercer physiquement…) et descendons le tunnel qui débute par un chemin pentu de plus de 320 mètres pour nous ramener jusqu’à 70 mètres sous terre. Jusque-là, ça a l’air tranquille, mais le souci sera la sortie de ce tunnel par cette même voie (voyons cela comme une activité cardio). Le tunnel est tellement étroit que nous devions parfois marcher en nous courbant la tête pendant de longues minutes (squat goals yay). C’est assez fascinant de réaliser qu’à la fin de ce tunnel, après les zones interdites, se trouve la Corée du Nord. Malheureusement, les photos étaient interdites.
Après notre pause déjeuner, nous poursuivons notre DMZ trip à l’Observatoire Dora, la partie la plus intéressante de notre excursion. Pour 1000 wons (~80 centimes d’euros), on pouvait utiliser les grosses jumelles pendant 2 minutes pour voir de près la Corée du Nord. On pouvait distinguer un village nord-coréen au loin : c’est ce fameux Propaganda Village. Ce petit village au nom de Kijong-dong est en réalité un faux village servant à montrer une belle image de la Corée du Nord. Je n’ai malheureusement pas réussi à prendre une photo bien nette de ce village, mais si vous tapez Kaesong ou Propaganda Village sur Google, il y a plusieurs prises très bien faites. À l’est de l’Observatoire, le drapeau Sud-Coréen flotte pour bien apparaître près de la frontière, ce à quoi, la Corée du Nord répondit jadis en plaçant leur drapeau respectif, à une taille bien plus importante. Au niveau sonore, c’est des hauts-parleurs qui ne cessent de diffuser des chansons de propagande à des kilomètres.
Dernière étape de notre excursion DMZ : la gare de Dorasan, aussi très intéressante. Il est possible de prendre un train tôt le matin pour rejoindre Seoul, mais il faut réserver son billet et avoir son passeport avec. On apprend qu’un projet d’ouvrir une ligne de train Seoul-Londres en passant par Pyeongyang est élaboré. À croire que tout est préparé pour la réunification. Avant de rejoindre les quais, on pouvait lire Pyongyang, la capitale de la Corée du Nord, comme destination. Sur une des voies ferroviaires, un faux train sert de mini-musée, exposant le contexte de cette gare, ainsi que l’histoire de la réunification de l’Allemagne, prise comme exemple et appui d’espoir pour que les deux Corées se réunissent un jour.
Bilan de cette excursion : bien que nous n’ayons pas vu le JSA (Joint Security Army – sous le contrôle de l’ONU), nous étions satisfaits de cette demi-journée au DMZ. La guide a été top et très compétente, sans oublier d’avoir rendu l’atmosphère agréable surtout sur un sujet très délicat. On peut se montrer réticent d’aller à DMZ s’il y a des risques de conflits qui pourraient affecter cette visite, mais si vous êtes hyper intéressés par l’histoire de la Guerre des Corées, on ne peut que vous recommander. J’ai personnellement aimé cette excursion et je dirais même que ce fut l’expérience la plus mémorable que j’ai eue pendant notre Korean Trip.
Avec mon chéri, on s’est dit qu’on a beaucoup de chances que le mur de Berlin soit tombé depuis longtemps. Malgré la similarité de ces séparations et l’optimisme dont les Coréens font preuve, on ne pouvait s’empêcher de garder un sentiment contraire pour les deux Corées, avec plein de questions dans la tête, considérant les actualités. Le plus triste est de penser qu’en plus de 70 ans, les générations passent et malheureusement, cela va rendre les relations familiales encore plus éloignées, voire déchirées. Quelle va être la suite prochainement ? 🙁
Wouah! Alors ça, ça devait vraiment être complètement dingue à voir !
C’est typiquement une excursion que j’aurais vraiment pu faire, ça doit être extrêmement impressionnant. Les Coréens du Sud parlent beaucoup de ce sujet ? Est-ce que c’est très présent dans leurs vie quotidienne ?
Chouette article ma Teaso! 🙂
Merki ma Mimounette ! Pour répondre à tes questions, les Coréens du Sud n’en parlent pas spontanément, mais si tu leur poses la question, ça ne leur dérange pas de répondre. Comme ça fait plus de 70 ans qu’ils vivent comme ça, j’ai l’impression que tout se résume à de l’indifférence (comme nous avec les attentats qui s’enchaînent); du coup, ils ne savent pas trop comment réagir, ou se positionner, mais ils continuent d’espérer. Le plus triste c’est qu’il y a des familles qui sont séparées et qui ne se verront plus jamais 🙁 Vraiment un gâchis… tout ça à cause de cette misérable mésentente politique !